Actualité patrimoniale

Titres démembrés : faire le bon choix avant une cession

Article à jour au 1er mars 2022, établi en fonction de la législation en vigueur en France et applicable aux personnes physiques résidentes fiscales en France.

Le démembrement de propriété est un levier en matière de transmission de patrimoine. En présence de valeurs mobilières ou de droits sociaux démembrés (portefeuille de titres par exemple), il convient de prévoir en amont le sort du produit de cession pour maîtriser les conséquences patrimoniales et fiscales de l’opération, comme en témoignent deux jurisprudences récentes du Conseil d’État.

L’intérêt d’une détention en démembrement de propriété

La pleine-propriété d’un bien peut-être scindée entre l’usufruit, qui permet de jouir d’un bien ou de bénéficier de ses revenus, et la nue-propriété, qui donne le droit de devenir plein-propriétaire au moment de l’extinction de l’usufruit. Le bien est dit « démembré ». Ce démembrement de propriété peut être subi, par exemple dans le cas d’une succession lorsque le conjoint survivant choisit de recevoir 100% de l’actif successoral en usufruit, les enfants recevant alors la nue-propriété. Le démembrement peut également être choisi, dans le cadre d’une stratégie d’anticipation de la transmission de son patrimoine.

L’intérêt d’une donation de nue-propriété avec réserve d’usufruit est multiple :

  • Le donateur usufruitier continue à utiliser le bien ou en percevoir les revenus (loyers, dividendes…) ;
  • Les droits de donation sont calculés en prenant pour référence la valeur de la nue-propriété, définie selon un barème qui dépend de l’âge de l’usufruitier au jour de la donation(1) : plus l’usufruitier est jeune au moment de la donation, plus le coût est faible ;
  • Au moment du décès de l’usufruitier, le nu-propriétaire devient plein propriétaire du bien sans acquitter de droits supplémentaires.

Que se passe-t-il en cas de cession de titres démembrés ?

Rappelons tout d’abord que pour procéder à la cession d’un bien démembré, il faut l’accord de l’usufruitier et du nu-propriétaire.

L’article 621 du Code Civil dispose qu’en cas de vente simultanée de l'usufruit et de la nue-propriété d'un bien, le prix se répartit entre l'usufruit et la nue-propriété selon la valeur respective de chacun de ces droits, sauf accord des parties pour reporter l'usufruit sur le prix. L’inconvénient majeur lié à la répartition du prix de vente est la disparition du démembrement de propriété : la quote-part du produit de cession qui revient à l’usufruitier réintègre le patrimoine de ce dernier en pleine propriété, et sera donc soumis aux droits de succession au moment du décès.

La règle de répartition du produit de cession n’est pas d’ordre public, donc les parties peuvent y déroger. Si les parties se sont préalablement mises d’accord pour remployer le prix de cession, le nu-propriétaire est alors en principe le seul redevable de l’impôt correspondant(2). La stratégie de démembrement est poursuivie, mais le nu-propriétaire paye l’impôt sur un flux qu’il ne reçoit pas : il pourra être opportun de le gratifier, en complément, de biens en pleine propriété. Lorsque les intéressés prévoient en amont de la cession que le prix sera attribué à l’usufruitier dans le cadre d’une convention de quasi-usufruit, la plus-value est imposable au nom de ce dernier. Le nu-propriétaire dispose alors d’une créance de restitution correspondant au produit de cession, qu’il pourra imputer sur le passif de succession du quasi-usufruitier.

Quels sont les points d’attention ?

Deux arrêts récents du Conseil d’État (CE, 2 avril 2021, n° 429187 et CE 17 novembre 2021 n° 437329) sont venus rappeler la nécessité d’anticiper le sort du produit de cession, et de soigner la rédaction des clauses contractuelles :

  • D’une part, il est rappelé que la détermination du redevable de l’impôt s’apprécie à la date du fait générateur, c’est-à-dire dans l’analyse des « clauses contractuelles en vigueur à la date de la cession(3) » : autrement dit, s’il n’est pas nécessaire de régler le sort du prix de cession des titres démembrés dans l’acte de donation, il est indispensable que les modalités soient définies avant la cession ;
  • D’autre part, le Conseil d’État distingue le caractère facultatif du caractère obligatoire du remploi du prix de cession prévu dans l’acte de donation : lorsque l’usufruitier conserve la faculté, mais non l’obligation, de remployer ou non le produit de la cession des titres dont il a l'usufruit, « le droit d'usufruit doit être regardé, pour l'imposition des plus-values résultant de la cession, comme reporté sur le produit de cette cession, rendant ainsi l'usufruitier intégralement redevable de l'imposition »(4). Peu importe donc en pareil cas qu’un remploi ait été effectivement réalisé.

En conclusion et au vu des enjeux majeurs en matière de paiement de l’impôt comme de poursuite de la stratégie de transmission patrimoniale, il est indispensable pour les parties de fixer à l’avance le sort du prix de cession des titres démembrés. Les clauses de l’acte de donation pourront le cas échéant, soit orienter les parties, soit leur rappeler la nécessité de conclure une convention avant ou concomitamment à la cession des titres, en apportant à la rédaction une attention particulière.

Nos experts sont à votre disposition pour vous accompagner dans ces réflexions, aux côtés de vos conseils.

(1)Article 669 du code général des impôts.

(2)Par exception, en cas de cession de titres d’un portefeuille dont le démembrement est d’origine successorale, l’usufruitier et le nu-propriétaire peuvent décider que les plus-values seront imposables au nom du seul usufruitier (l’option expresse et irrévocable doit être adressée à la banque).

(3)CE 17 novembre 2021 n° 437329.

(4)CE, 2 avril 2021, n° 429187.

Le présent document, de nature publicitaire, n’a pas de valeur contractuelle. Son contenu n’est pas destiné à fournir un service d’investissement, il ne constitue ni un conseil en investissement ou une recommandation personnalisée sur un produit financier, ni un conseil ou une recommandation personnalisée en assurance, ni une sollicitation d’aucune sorte, ni un conseil juridique, comptable ou fiscal de la part de Société Générale Private Banking France.

Les informations contenues sont données à titre indicatif, peuvent être modifiées sans préavis, et visent à communiquer des éléments pouvant être utiles à une prise de décision. Les informations sur les performances passées éventuellement reproduites ne garantissent en aucun cas les performances futures.

Avant toute souscription d’un service d’investissement, d’un produit financier ou d’un produit d’assurance, l’investisseur potentiel (i) doit prendre connaissance de l’ensemble des informations contenues dans la documentation détaillée du service ou produit envisagé (prospectus, règlement, statuts, document intitulé « informations clés pour l’investisseur », Term sheet, notice d’information, conditions contractuelles, …), notamment celles liées aux risques associés; et (ii) consulter ses conseils juridiques et fiscaux pour apprécier les conséquences juridiques et le traitement fiscal du produit ou service envisagé. Son banquier privé est également à sa disposition pour lui fournir de plus amples informations, déterminer avec lui s’il est éligible au produit ou service envisagé qui peut être soumis à des conditions, et s’il répond à ses besoins.  En conséquence, Société Générale Private Banking France ne peut en aucun cas être tenue responsable pour toute décision prise par un investisseur sur la base des seules informations contenues dans ce document.

Les prévisions concernant les performances futures sont basées sur des hypothèses qui peuvent ne pas se concrétiser. Les scénarios présentés sont des estimations de performances futures, fondées sur des informations passées sur la manière dont la valeur d’un investissement varie et/ou sur les conditions de marché actuelles, et ne sont pas des indications exactes. Le rendement obtenu par des investisseurs sera amené à varier en fonction des performances du marché et de la durée de conservation de l’investissement par l’investisseur. Les performances futures peuvent être soumises à l’impôt, lequel dépend de la situation personnelle de chaque investisseur et est susceptible de changer à l’avenir.

Pour une définition et description des risques plus complète, veuillez vous référer au prospectus du produit ou, le cas échéant, aux autres documents réglementaires (si applicable) avant toute décision d’investissement.

Le présent document est confidentiel, destiné exclusivement à la personne à laquelle il est remis, et ne peut être ni communiqué ni porté à la connaissance de tiers, ni reproduit totalement ou partiellement, sans accord préalable et écrit de Société Générale Private Banking France. Pour de plus amples informations, cliquez ici


  N° ADEME : FR231725_01YSGB